Acupuncture et sevrage tabagique
S’il existe un domaine où l’acupuncture est connue du grand public c’est bien celui du sevrage tabagique. D’après une étude publiée par le Docteur Jean Vibes dans son ouvrage L’Acupuncture (éditions Privat) 63% des patients traités arrêtent de fumer après la première séance, auxquels il faut ajouter 34 % ayant réduit à 86 % leur consommation tabagique.
D’après mon expérience en cabinet, c’est environ 80 % des patients qui arrêtent de fumer après une première séance.
Il faut cependant garder à l’esprit qu’une consultation concernant l’arrêt du tabac se déroulera différemment selon qu’un patient prendra rendez-vous chez un acupuncteur symptomatique ou un acupuncteur traditionnel. Le premier se contentera généralement de poser deux aiguilles près du nez (points symptomatiques) alors qu’un véritable acupuncteur traditionnel traitera aussi le terrain de son patient, augmentant considérablement les chances de réussite du traitement.
Certains patients me demandent s’il faut « croire » à l’acupuncture pour que le sevrage tabagique fonctionne ou encore si le résultat du traitement est d’abord une question de volonté. Sans négliger l’importance du facteur psychologique lors d’un traitement anti-tabac voici une anecdote intéressante qui confirme bien l’efficacité de l’acupuncture dans ce domaine:
Un jour, un patient au tempérament anxieux vint me consulter pour un problème d’insomnie liée au stress. Après une première séance d’acupuncture, nous convenons d’un second rendez-vous quinze jours plus tard. A peine entré dans mon cabinet, ce patient tient à m’informer qu’il s’est passé quelque chose « d’extraordinaire » suite à notre première rencontre. Il me révèle alors qu’il était en sevrage tabagique depuis plus d’un mois (ce que je ne savais pas) et luttait difficilement chaque jour contre l’envie de fumer jusqu’à ce qu’il vienne me consulter pour l’insomnie et l’anxiété. Depuis cette première consultation, toute envie de fumer l’avait quitté spontanément et il se sentait serein. Je ne fus pas du tout surpris puisque j’utilise (à quelques exceptions près) les mêmes points d’acupuncture pour traiter l’anxiété et le sevrage tabagique. Voilà bien un exemple de l’efficacité de l’acupuncture relatif au traitement anti-tabac.
D’après mon expérience en cabinet, l’arrêt du tabac comporte trois facteurs:
– le facteur psychologique : concerne la prise de décision qui doit être ferme et volontaire.
– le facteur psychique : concerne l’apaisement, la détente, la relaxation, l’élimination du stress.
– le facteur physique : concerne les effets physiques du sevrage, la sensation de manque au niveau du corps.
Le facteur psychologique appartient presque entièrement au patient. En revanche, l’acupuncture se révèlera surtout efficace en agissant sur les aspects psychiques et physiques du sevrage.
On me demande parfois s’il vaut mieux venir consulter au moment où l’on a décidé d’arrêter de fumer ou bien s’il est préférable d’arrêter d’abord et de consulter lorsque les effets du sevrage deviennent trop intenses. Il n’y a pas de règle absolue en la matière car chaque être humain est différent. Certains de mes patients ont arrêté de fumer après une séance d’acupuncture, pour d’autres il en a fallu deux ou trois. Ce que je crois cependant, c’est qu’il ne faut pas se braquer contre soi-même mais envisager l’arrêt du tabac avec un certain détachement. Il est aussi important de ne plus se positionner en victime de sa dépendance mais d’en prendre la responsabilité, sans culpabiliser pour autant. Lorsque cette étape est franchie il est plus facile d’envisager le sevrage sereinement.
Les méfaits du tabac ont un impact beaucoup plus étendu qu’on pourrait imaginer de prime abord. La très sérieuse revue médicale Fertility and Sterility a publié, le 30 juin 2011, une étude selon laquelle un père qui serait fumeur au moment de la conception affecterait la fécondité future de son enfant dans le cas où il s’agirait d’une fille. En effet, celle-ci aura la surprise de se retrouver ménopausée prématurément et donc d’avoir une vie reproductive à la durée plus limitée que pour une autre femme.
Pour conclure je précise que même si les effets nocifs du tabac sur la santé ne sont plus à prouver, je ne souscris pas aux campagnes dites de sensibilisation fondées presque exclusivement sur la culpabilisation des fumeurs. Au lieu d’accabler les personnes dépendantes au tabac, les pouvoirs publics devraient se questionner sur les raisons qui incitent les gens à fumer. Ils découvriraient ainsi que la plupart du temps ce sont les difficultés sociales, familiales, professionnelles ou autres, bref la dureté de la vie (dont les politiques sont parfois responsables) qui engendrent l’addiction à la cigarette. Quant au « coût » que représenterait le tabagisme pour la santé publique, il ne faudrait pas oublier de mettre dans l’autre plateau de la balance le « coût » des maladies nosocomiales, iatrogènes, et autres infections médicamenteuses. Nos politiques devraient se rappeler qu’il n’y a pas que le tabac qui tue et que les fumeurs sont des êtres humains avant d’être des unités économiques.